Suivez mes commentaires sur l'actualité de la justice et des barreaux

  • Les murs n'ont pas d'oreilles - Mot du président - 03/02/2016

    Durant l’année 2015, 1.103.496 migrants ont atteint l’Europe, par terre ou par mer. 910.663 sont entrés par la Grèce. 157.083 par l’Italie. 56% venaient de Syrie, 24% d’Afghanistan, 10% d’Irak. 30% d’entre eux sont des enfants.

    Avant le conflit qui la secoue, la Syrie comptait 17 millions d’habitants. 300.000 sont morts. Plus de 10 millions ont fui leur domicile. 6,5 millions sont dans des camps en Syrie même. 4 millions à l’étranger, dont 2 millions en Turquie et 1,2 million au Liban. Et donc 600.000 à peu près en Europe… Et dans ce recensement ne sont pas compris ceux qui sont coincés chez eux, dans des villes assiégées.

    Plus de 90% des demandes d’asile des Syriens sont acceptées. Plus de 65% des demandes d’asile des Afghans sont acceptées…

    L’Allemagne, à elle seule, accueille un million de réfugiés. Faites le compte… Il en reste combien pour les 27 autres États ?

    On estime que, pendant l’année 2016, un million de réfugiés supplémentaires tenteront de rejoindre l’Europe.

    Nous devrions – ce n’est pas une règle de morale, c’est une obligation de droit positif, inscrite dans la Convention de Genève – leur assurer protection, leur donner l’asile. Nous devrions leur permettre de défendre leur demande, dans le respect des droits de la défense, en étant pourvus de l’aide d’avocats qui les aideraient à faire valoir leurs droits.

  • Vienne, la nuit : sonne l'heurt !

    Depuis 44 ans, le barreau autrichien invite ses correspondants européens à la « Conférence des présidents ». Une tradition née à l'époque où un rideau de fer rouge coupait l'Europe en deux. Mais à Vienne, l'espace de deux jours, sous les chapiteaux des Palais, à l'occasion de réceptions ministérielles, dans les flonflons du Juristenball ou dans les kellers où biéres et schnitzels coulent à flots, chacun était là. Point de rencontre unique en ce temps.

    Le contexte a changé depuis. Une avocate polonaise vient de céder la présidence du C.C.B.E. à un français. Un écossais la cédera bientôt à un tchèque.

    Plus de mur, plus de rideau. Et pourtant ?

    Le sujet de la 44e conférence était interpellant : Les limites du droit.

    C'était de migration dont il était question.

    David Smith, le président irlandais du Comité migration du C.C.B.E., brosse d'abord le tableau. La frontière syrio-turque, les passeurs, les tempêtes, Lesbos ou Lampeduza, la course vers le Nord, arrêts à chaque étage. La mort qui prélève son dû à chaque étape. Et toujours le risque du retour à la case départ. Des droits quasi-inexistants. Un barreau jusqu'ici impuissant. Quelques cris pour en accompagner d'autres, tellement plus dramatiques.

  • Spécialisez-vous ! - Mot du président - 18/02/2016

    Ce vendredi 12 février 2016, à l’occasion de la rentrée du barreau de Tunis, le bâtonnier Abdellatif Bouachrine, secrétaire général de l’Union des avocats arabes, s’est lancé dans un vibrant appel à la formation. Avec une emphase qui a surpris certains invités, il a martelé la nécessité, pour les avocats comme pour les autres titulaires de professions libérales, d’être en mesure d’offrir à leurs clients des services de haute qualité, ce qui requérait qu’ils se soumettent à des exigences de formation initiale, continue et spécialisée.

    Il a évidemment raison.

    Le temps où l’on était avocat une fois pour toutes, parce que l’on avait obtenu un diplôme de droit et que l’on avait prêté serment, que l’on avait, pendant trois ans, accompagné un maître de stage qui ne traitait d’ailleurs peut-être aucunement le type de causes que l’on est aujourd’hui susceptible d’accepter, est manifestement révolu. Mon maître de stage était, il est vrai entre autres choses, un spécialiste du droit minier. Je traite aujourd’hui principalement des litiges de droit de l’urbanisme et de l’environnement, matières qui n’étaient même pas enseignées au moment où j’ai accompli mes études… Faut-il un dessin ?

  • Ping-pong

    Ping-pong, Éric Therer vs Benjamin Monti, Liège, Eastern Belgium at night éd., 2015, 40 p., 8 €[1].

     

    "Attendu que, tout en admettant la matérialité des faits, l'arrêt attaqué, sans avoir égard aux circonstances particulières dans lesquelles ils s'étaient manifestés, a relaxé les prévenus, au motif que les parties sexuelles de la jeune femme étaient cachées par un slip en monokini suffisamment opaque et que Claudine X n'avait pris aucune attitude ni affecté aucun geste lascif ou obscène ;

    Mais attendu qu'en refusant de faire application de l'article 330 aux faits poursuivis qui s'analysent en une exhibition provocante de nature à offenser la pudeur publique et à blesser le sentiment moral de ceux qui ont pu en être les témoins, la cour d'appel a violé les textes ci-dessus visés;

    Par ces motifs, casse et annule, mais seulement dans l'intérêt de la loi, et sans renvoi, l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 29 janvier 1965".

    Fausse application de la loi ? L'appréciation de la cour d'Aix-en-Provence ne gisait-elle pas en fait ? N'est-ce point la Cour de cassation, transportée par ses émotions, qui aurait outrepassé ses prérogatives ?

  • Où va la Justice ?, par Bruno Dayez

    Où va la Justice ?, par Bruno Dayez, La Charte, collection « La clé des gens », Bruxelles, 2016, 304 pages

     

    « Dans la version officielle du droit, nous sommes des « auxiliaires de justice ». En réalité, nous en sommes l’accessoire ! Plusieurs raisons « structurelles » expliquent cet état de choses. La première tient au statut de l’avocat, car ce statut recèle, en soi, une ambiguïté fondamentale : sommes-nous là pour servir la justice ou pour la contrecarrer ? Pour cautionner le système ou pour le saborder ? Pour défendre les intérêts particuliers d’un prévenu ou apporter notre concours à l’entreprise de juger, laquelle ne doit viser que l’intérêt général ? En un mot, sommes-nous la goutte d’huile ou le grain de sable ? ».

    Notre confrère Bruno Dayez a réuni en un beau volume les chroniques qu’il publie régulièrement dans Le Soir, La Libre Belgique, Le Vif-L’Express, Le Journal des Tribunaux, Le Journal des procès,…, et par lesquelles il nous livre ses réflexions sur l’évolution de notre justice pénale.

    Pour ou contre la Cour d’assises ? Lui est contre, résolument contre, ne voyant qu’une fiction dans l’image du jury populaire, soi-disant émanation du peuple, qui pourrait, pour cette raison, être affranchi de toutes les obligations et garanties liées à la fonction de juger.

  • Découvrez ce sein que je voudrais voir... - Mot du président - 04/02/2016

    L’enquête « J’aurais 40 ans en 2025 » à laquelle nous venons de vous inviter à participer le révèle indiscutablement : vous vous estimez insuffisamment informés sur ce qui se trame au sein d’AVOCATS.BE. C’était aussi le sens général des critiques que François Viseur, l’orateur de la séance de rentrée de Bruxelles, dirigeait contre nos institutions.

    Qui sommes-nous ? Que faisons-nous ? Comment et avec qui ?

    Pourtant, nous avons le sentiment de ne pas ménager nos efforts pour assurer la transparence :

         - Depuis près de dix ans, tous les procès-verbaux des assemblées générales sont accessibles à tous les avocats via notre extranet. Ils sont très complets et comprennent, en annexes, tous les rapports préalables sur la base desquels travaille l’assemblée. D’accord, il y manque un moteur de recherche performant. Voilà une amélioration qui est relativement simple à mettre en œuvre.

         - Depuis quatre ans, notre Tribune, devenue bimensuelle, contient une rubrique « En direct de l’A.G. » qui résume les principales décisions adoptées. Et aussi les chroniques d’actualités législatives et européennes élaborées par nos spécialistes. Et nous diffusons aussi des Tribunes flash dès qu’une information essentielle doit vous être communiquée ;

  • Quels nouveaux horizons pour l'interprofessionalité ?

    J'ai participé, ce deux février 2016, à la Journée de l'innovation dans le monde du droit et du chiffre organisée par Le monde du droit.

    Voici le powerpoint que j'ai utilisé à cette occasion.

    Le point sur la situation en Belgique, à la veille de l'adoption par AVOCATS.BE d'un nouveau règlement sur les participations externes au capital des cabinets d'avocats et sur les associations multidisciplinaires.

  • Un instant appuyé contre le vent, par Lionel Jung-Allégret

    Un instant appuyé contre le vent, par Lionel Jung-Allégret, Tulle, Al Manar, 2014, 78 pages, 18 €.

     

    Un matin nous partons, le cerveau plein de flamme,
    Le cœur gros de rancune et de désirs amers,
    Et nous allons, suivant le rythme de la lame,
    Berçant notre infini sur le fini des mers…

    Brillante variation sur Le voyage de Charles Baudelaire, Un instant appuyé contre le vent, long poème en prose de notre confrère parisien Lionel Jung-Allégret, troisième volet d’une trilogie inaugurée par Écorces et continuée par Parallaxes, pose un regard désenchanté sur le parcours de nos vies.

    Richement illustré par les encres de Jean Anguera, il nous accueille au cri initial pour nous mener jusqu’au souffle final. Pour quoi ?

    « Avancer

     

    lèvres ouvertes

    à même les lèvres de la terre,

     

    Avancer

    vers ce qui se tait.

     

    Dans le désordre étincelant et sans cesse incertain de chaque jour ».

     

    Le désenchantement d’un monde sans transfiguration, sans transcendance, sans transe. Où nous sommes seulement hommes, rien qu’hommes. Sur terre. Pour un instant. Avec le vent qui siffle.

     

    « Et s’il fallait avancer ainsi.

     

    Fièrement,

  • 24 heures chrono

    En Belgique, aujourd’hui, nul ne peut être privé de sa liberté sans une décision motivée, signée par un juge d’instruction, qui précise quelle absolue nécessité pour la sécurité publique justifie sa détention.

    Depuis quatre ans, ce délai de vingt-quatre heures peut être prolongé, une seule fois, pour une durée supplémentaire de vingt-quatre heures maximum, par une décision qui précise, d’une part, les indices sérieux de culpabilité relatifs à un crime ou un délit qui pèsent sur la personne privée de liberté et, d’autre part, les circonstances particulières qui justifient cette prorogation.

    Au prétexte de la lutte contre le terrorisme, le gouvernement voudrait aujourd’hui restreindre considérablement cette garantie fondamentale pour l’ensemble de nos citoyens.

    Il s’agirait de porter le délai de base de 24 à 48 heures et de l’allonger à 72 heures lorsque les personnes privées de leurs libertés sont soupçonnées d’actes terroristes.

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