Prête-moi ta plume

  • Nouveaux contes juridiques, par François Ost

    Nouveaux contes juridiques, par François Ost, Paris, Dalloz, 2021, 205 pages, 19 euros.

    Où s’étaient-ils trompés ? Ils avaient essayé pourtant d’appliquer la recette de Zeus : aidos, dikè, le respect, le sens de la justice – et le débat entre tous sur ces questions. Bien sûr, chacun était venu avec ses obsessions, ses ressentiments, ses intérêts particuliers. Mais elle avait cherché à élargir les perspectives, à faire prévaloir l’intérêt général. Ils tentaient de progresser, à coups d’essais, d’erreurs, d’apprentissage collectif. Mais tout cela n’avait pas suffi et il y avait urgence…

    La démocratie, l’État de droit, les droits humains, notre civilisation, … sont-ils condamnés ? Avons-nous eu tout faux ?

  • Le droit d'emmerder Dieu, par Richard Malka

    Le droit d’emmerder Dieu, par Richard Malka, Paris, Grasset, 2021, 96 pages, 10,5 euros.

    Oui, il faut prendre des risques pour essayer de faire en sorte que nos enfants ne vivent pas dans le monde des Kouachi, des Coulibaly et des Imran Khan. La liberté de critique des idées et des croyances, c’est le verrou qui garde en cage le monstre du totalitarisme.

    ...

    Quand il n’écrit pas des romans ou des scénarios de bandes dessinées[1], Richard Malka plaide. Pour la liberté d’expression. Pour nos valeurs républicaines. Pour Charlie.

    Ce petit ouvrage, c’est le texte de la plaidoirie qu’il avait préparée pour le procès des frères Kouachi, de Coulibaly et des autoproclamés idéologues qui les ont aidés. Il l’a prononcée le 4 décembre 2020, pas tout à fait en ces termes bien sûr, mais en en suivant le canevas.

    Savez-vous que pour exciter les fanatiques et induire la fatwa qui a été lancée contre ceux qui ont osé publier les fameuses caricatures de Mahomet, quelques imams danois particulièrement pervers les ont diffusées en y ajoutant trois autres caricatures – elles vraiment insultantes – jamais publiées ni dans le Jyllands-Posten, ni dans Charlie, ni ailleurs...

  • L'enfer de Dante mis en vulgaire parlure, par Antoine Bréa

    L'enfer de Dante, mis en vulgaire parlure, par Antoine Bréa, Montréal, Le Quartanier, 2021, 400 pages, 23 euros.

    Commak, fêlée la caboche à Bréa ? Mettre en vulgaire parlure la rimaille à Dante, ci n’ê nin ti un fameux pastis ?

    En prime, le gonze nous rencarde, en graffant Flaubert, sans déc.

    [...]

    L’enfer n’est nin scribouillé dans la lingue des bourges. Ni latin, ni rital. Un fieffé sabir, un jars comme on en jasait dans les limbes de Florence à c’t heure. Autant cracher que pour capter l’affur aujourd’hui, c’est bernique. Y a degun qui y remettrait son gripard.

    Bréa n’est donc pas le premier crachoir qui s’escrime à une adaptation. Traduttore, traditore, disent les empêgués. L’illuminé s’essaye donc à nous fourguer une bafouille en argot/verlan/jargon, histoire qu’on déniche adonf la zikmu du bazar basique.

    Capiche ? Pas pérave, ni relou. Mais pour afficionados. Car c’est salé et, pour biter, il faut s’agriffer, louquer où on met les arpions et dicave dans le glossaire que le ballot nous baille à la fin pour y retrouver ses morpions. Cela dit, c’est jouissif comme un San Antonio si on prend la patience. Je kiffe.

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    https://latribune.avocats.be/fr/l-enfer-de-dante-mis-en-vulgaire-parlure...

  • Pas de quartier ? par Pierre Joxe

    Pas de quartier ?, par Pierre Joxe, Paris, Fayard, 2012, 320 pages, 19,3 euros.

    En attendant, il y a une enfant maltraitée en France par un droit maltraité. Un droit assez tordu pour qu’elle puisse être expédiée en prison pour un petit larcin, alors que l’ancien président de la République française échappe à toute poursuite pendant des lustres pour des détournements de millions connus et reconnus de tous ! C’est d’ailleurs durant le dernier mandat de ce président, alors qu’il multipliait les manœuvres pour échapper à la justice, qu’a été lancée par un de ses obligés la grande offensive politique contre un prestigieux héritage de la Résistance : l’ordonnance du 2 février 1945 « relative à l’enfance délinquante ».

    Pierre Joxe, plusieurs fois ministre (Industrie, Intérieur, Défense) sous François Mitterrand, puis président de la Cour des comptes et membre du Conseil Constitutionnel, a décidé, en 2010, à l’âge de 76 ans, de revêtir la robe d’avocat et de se consacrer à la défense des mineurs.

    Il nous livre un témoignage saisissant, commençant par une série de portraits de toute cette jeunesse marginalisée, maltraitée, reléguée dans les oubliettes, désocialisée : petites voleuses, petites frappes, lycéens incendiaires, braqueurs, fugueurs, enfants violés devenus eux-mêmes violeurs, apaches.

  • 1857 : la littérature en procès, par Emmanuel Pierrat

    1857 La littérature en procès, par Emmanuel Pierrat, Paris, Hermann, 2021, 220 pages, 22,1 euros.

    Attendu que l’erreur du poète, dans le but qu’il voulait atteindre et dans la route qu’il a suivie, quelque effort de style qu’il ait pu faire, quel que soit le blâme qui précède ou qui suit ses peintures, ne saurait détruire l’effet funeste des tableaux qu’il présente au lecteur, et qui, dans les pièces incriminées, conduisent nécessairement à l’excitation des sens par un réalisme grossier et offensant la pudeur ;

    Attendu que Baudelaire, Poulet-Massis et De Broise ont commis le délit d’outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs, savoir : Baudelaire, en publiant ; Poulet-Massis et De Broise en publiant, vendant et mettant à la vente, à Paris et à Alençon, l’ouvrage intitulé Les Fleurs du mal, lequel contient des passages ou expressions obscènes ou immorales ;

    C’est en ces deux attendus que, le 21 août 1857, le tribunal de Paris ordonna que soient retirés des Fleurs du mal six des plus beaux poèmes jamais écrits, dont le somptueux Les bijoux.

    « La très chère était nue et, connaissant mon cœur,

    Elle n’avait gardé que ses bijoux sonores

    Dont le riche attirail lui donnait l’air vainqueur

    Qu’ont en leurs jours heureux les esclaves des maures… »

    ...

  • Van Loo disparaît, par Alain Berenboom

    Van Loo disparaît, par Alain Berenboom, Bruxelles, Genèse édition, 2021, 286 pages, 22,5 euros.

    Allons Michel, un peu de déontologie, que diable ! Où est ton sens de la juste cause ?

    D’autant que celle-ci ne semble pas si inacceptable. Traquer de mystérieux fantômes qui terrorisent le château qu’un étrange commerçant, ayant fait fortune dans l’import-export pendant la guerre alors qu’il s’était exilé au Canada, est venu racheter après qu’il eût été confisqué à son rexiste de propriétaire, cela ne serait-il pas une cause noble ?

    Voici donc notre cher détective parti dans le fin fond du Hainaut pour se muer en chasseur de spectres. Quelle imprudence ! Un fantôme en mouvement, c’est plus difficile à saisir qu’une gueuze framboise à l’arrêt.

    Et tandis que ses adversaires ont tôt fait de vider le sinistre manoir de ses occupants, l’enquête fait surgir d’autres ectoplasmes. Il y en a des souvenirs cachés, des silences complices, dans ces villages ruraux du début des années 50. Il est certains secrets qu’il est dangereux d’exhumer.

    Alain Berenboom a l’art d’inscrire ses récits, fantaisistes ou fantastiques, dans l’histoire réelle. L’autre bout de la lorgnette met toujours en lumière des dessous plus ou moins oubliés. Et pas toujours nets.

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  • Boule de juif, par Foulek Ringelheim

    Boule de juif, par Foulek Ringelheim, Bruxelles, Genèse éditions, 2021, 136 pages, 17,5 euros.

    L’antisémitisme, la guerre, l’extermination n’avaient fait que renforcer l’attachement de ma mère à sa judéité, elle était plus juive que jamais. Hitler avait décrété qu’Auschwitz serait notre terre promise : renier le judaïsme eût été parachever le projet nazi. Par un de ces paradoxes dont les enfants ont le secret, à force de m’entendre dire que j’étais un survivant, j’en étais arrivé à me croire immortel, immortel parce que juif.

    Comment se construit un enfant pendant une guerre ? Pendant une guerre où les siens sont traqués pour être exterminés ? Une guerre qui force ses parents à la cacher, à le dissimuler dans un internat dans lequel les siens sont taxés de déicides ? Où, bien sûr, il voudrait être comme les autres, c’est-à-dire pas comme les siens ?

  • L'horizon en éclats, par Marie-Bernadette Mars

    Après deux superbes romans, Kilissa et, surtout, L’échelle des Zagoria, Marie-Bernadette Mars nous livre ce recueil de ce qu’elle appelle « nouvelles », je dirais plutôt « fragments », qu’elle a recueillis auprès des réfugiés qu’elle a accueillis pendant la crise migratoire que nous vivons. 19 éclats, 19 histoires poignantes, 19 témoignages du malheur que les hommes peuvent infliger aux hommes.

    Pourquoi des hommes et des femmes, des jeunes et des vieillards, quittent-ils leur pays, leur ville, leur maison ? Pourquoi abandonnent-ils presque tout, en perdant d’ailleurs généralement le reste pendant leur fuite aux mains des passeurs et des différents escogriffes qui se repaissent de leur infortune ? Pourquoi risquent-ils leur vie sur des coquilles de noix pour tenter de rejoindre nos pays de cocagne, où ils seront traités comme des bêtes ?

    La fuite sur les routes, les camps, pourvu que plus jamais, nulle part, les jeunes ne connaissent cela !

    Il faut lire cet ouvrage pour comprendre que l’exil ce n’est jamais un plaisir. L’exil, c’est d’abord le malheur. L’exil c’est quand il n’y a plus d’autre possibilité. « Parce que chez moi, il n’y a rien », comme le chante Francis Cabrel.

  • Les chants et les jeux, par Géry Van Dessel

    Les chants et les jeux, par Géry Van Dessel, Lyon, Saint-Léger éditions, 2021, 176 pages, 17 euros.

     

    Amis de mon pays

    Amis, révoltons-nous

    L’injustice qui sourit

    Loi du silence qui règne partout

    Avocat spécialisé en droit des assurances, inscrit au barreau du Brabant Wallon, Géry Van Dessel est aussi un poète et un essayiste. Un premier recueil de poésies, Le bouillonnement, est paru en 2020. Un essai consacré au Rosaire, Dans l’éblouissement du cœur, vient également de paraître.

    L’inspiration est clairement chrétienne, catholique, même si la religion n’envahit pas ses poèmes.

     

    https://latribune.avocats.be/les-chants-et-les-jeux-par-gery-van-dessel/

  • Papiers d'identité, par Jean-Pierre Versini-Campinchi

    Papiers d’identité, par Jean-Pierre Versini-Campinchi, Paris, L’Éventail, 2020, 304 pages, 22 euros.

     

    « C’est le fils de Pierre ». Jamais je n’entendrai aucune question du style : « Et la mère, c’est qui ? », ou encore : « Comment se fait-il qu’il soit si basané, ce petit garçon ? » Il est vrai qu’avec des cheveux bouclés et noirs, si je ne ressemble pas tout à fait à un Antillais classique, on pouvait me confondre facilement avec un Marocain ou un Tunisien. Mais la question n’est pas posée et elle ne l’a jamais été. Très difficile dès lors d’émettre un doute sur son identité.
    Je suis le fils de Pierre.

    Pierre est corse.

    Je suis corse.

    Point barre.

    Quel curieux pedigree que celui de Jean-Pierre Versini-Campinchi ! Corse par un père qui fut avocat et faux-monnayeur et qui lui fit six demi-sœurs avec cinq autres femmes que sa mère, Antillais par sa mère, picard par le lieu où il vécut sa petite enfance, africain aussi, un peu, parce qu’il y passa plus de quatre années pendant sa jeunesse. Mais donc corse avant tout, comme ce grand-père, César Napoléon Sampiero Campinchi qui, entre les deux guerres, fut un des ténors du barreau de Paris, membre du conseil de l’Ordre, puis garde des sceaux et ministre de la marine de guerre.

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