Droits de l'homme

Mémoire d'un juge trop indépendant, par Renaud Van Ruymbeke

Mémoires d’un juge trop indépendant, par Renaud Van Ruymbeke, Paris, Tallandier, 2021, 304 pages, 20,90 euros.

Ainsi qu’il soit de gauche ou de droite, le parti au pouvoir adopte le même comportement à l’égard de la justice : il entrave son action pour préserver ses propres intérêts.

Qui ne connaît le juge d’instruction Renaud Van Ruymbeke ? Celui qui est intervenu dans les affaires Boulin, Urba, frégates de Taïwan, Clearstream, Kerviel, Cahuzac, Karachi, Balkany, …, la terreur des hommes politiques.

Ce n’est pas le premier ouvrage qui est consacré à ce juge d’instruction d’un courage exceptionnel. Mais celui-ci est écrit par lui-même, avec la collaboration de Jean-Marie Pontaut, auteur de très nombreuses autres enquêtes.

Trop indépendant ? Peut-on, lorsque l’on est magistrat, être « trop » indépendant ? Dans l’esprit de certains politiciens, oui, manifestement. Il fut un temps, il est vrai, où - dérive typiquement humaine lorsqu’un système tourne sur lui-même ? – la corruption était devenue un mode de financement habituel des partis politiques. A tel point que, lorsque Mitterrand arriva au pouvoir, il se contenta de solliciter un rééquilibrage des contributions occultes d’Elf, sans remettre en cause le principe même de commissions qui avaient été érigées en système depuis la présidence du Général de Gaulle.

 

Une affaire si facile, par Francis Szpiner - Secret défense, par Hervé Temine

Une affaire si facile, par Francis Szpiner, Paris, Le Cherche-Midi, 2020, 152 pages, 17,75 euros.

Secret défense, par Hervé Temine, Paris, Gallimard, 182 p., 18 €.

Le mot « aveu » commence comme « aveuglement », et bien souvent cela y conduit.

« Maître, j’ai tué mon mari ».

Une petit phrase toute simple, annonciatrice d’une affaire si facile.

Martine est une femme ordinaire. Excellente et dévouée secrétaire dans une entreprise prospère, très appréciée de son patron. Mariée à un homme un peu hâbleur, bon vendeur de voitures. Mère d’un petit garçon de six ans. Ils occupent tous trois un pavillon de banlieue, selon la formule consacrée.

Cela c’est la façade. Derrière celle-ci, il y a une réalité plus sordide. Depuis la naissance de leur fils, l’alcôve est devenue un enfer. Il y eût d’abord des pratiques de plus en plus violentes, sodomie et coups. Puis de l’échangisme, d’abord dans des lits, puis sur des capots de voitures, dans les bois. Avec toujours des coups. Avilissement, abêtissement.

Ce matin, après une nouvelle tentative de sodomisation, Martine a craqué. Elle a décroché le fusil de son chasseur de mari et lui a balancé une bonne décharge de chevrotines. Comment imaginer une affaire plus limpide ?

 

Cobre, de Michel Claise

Cobre, par Michel Claise, Bruxelles, Genèse éditions, 2019, 232 pages, 13,95 euros.

Ils pourront couper toutes les fleurs, ils n’empêcheront jamais le printemps.

Cette citation de Pablo Neruda est un de mes mantras.

Elle semble l’être aussi pour Michel Claise.

Il l’explique, dans la postface de cet ouvrage, de façon moins poétique mais bien argumentée.

C’est le triste exemple du renversement d’un gouvernement démocratiquement élu par une junte militaire qui s’installe au pouvoir, supprime les libertés individuelles, impose la censure de la presse, ordonne la pratique des tortures, l’élimination physique des opposants sous le regard aussi réprobateur qu’impuissant d’une communauté internationale choquée et laxiste. Mais aussi de l’intervention d’une superpuissance qui va pousser à la déstabilisation préalable du pays et à la corruption des militaires pour les mener au pouvoir, parce que les intérêts économiques de leurs entreprises sont menacés. Jimmy Carter s’est excusé. Cela n’a pas empêché Georges Bush Junior d’inventer l’existence d’armes chimiques en Irak pour envahir ce pays, ouvrant une boîte de Pandore dont nous supportons encore aujourd’hui les tragiques conséquences. Et tout cela pour quoi ? Pour développer les intérêts de l’industrie américaine du pétrole et de l’armement…

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