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Le mot du président – 24/10/2013
Chers confrères,
Je suis de la génération John Lennon, celle qui ne pouvait s’empêcher d’imaginer un monde meilleur : no countries, no greed, no hunger, with all of the people living life in peace.
C’est en ces termes que j’ai conclu le discours que j’ai adressé aux hommes politiques, représentants des institutions européennes, hauts magistrats, journalistes, bâtonniers et avocats qui nous ont fait le plaisir et l’honneur de participer à la réception qui était organisée le lundi 14 octobre dernier, à l’occasion de ma prise de fonction. Si vous le souhaitez, vous pouvez prendre connaissance du texte intégral de ce discours sur ce blog, ou en cliquant sur le lien que voici.
Ce rêve est aujourd’hui mis à rude épreuve. Ce mercredi 23 octobre 2013, alors que le macadam de la petite ceinture est encore chaud des violences qu’ont subies, la veille, les réfugiés afghans qui réclament, tout simplement, un peu de justice et de compréhension (faut-il rappeler qu’un réfugié afghan renvoyé dans son pays, il y a quelques semaines, a été exécuté par les talibans alors qu’il venait à peine d’y remettre les pieds), c’est au tour des policiers de manifester au même endroit pour protester contre les violences dont ils sont l’objet. Et on nous annonce, pour le soir même, une bataille rangée entre les hooligans affidés au Sporting d’Anderlecht et ceux du Paris Saint-Germain !
Notre société est décidément trop violente. Et cette violence obéit à la loi des vases communicants. Les brutalités policières (d’autres font l’objet d’un procès retentissant, actuellement pendant devant les juridictions limbourgeoises) répondent aux brutalités qu’ils subissent eux-mêmes, de plus en plus souvent, mais elles les suscitent aussi. C’est une spirale infernale. Comment ne pas soutenir le discours de cette policière, entendue sur nos ondes ce mercredi matin, qui réclamait une meilleure formation à la maîtrise de la violence pour tous les policiers ? Il ne s’agit là, bien sûr, que l’un des aspects du problème et celui-ci doit être pris à bras-le-corps, d’une façon globale. Mais sans mesures énergiques, il y a tout lieu de craindre que la spirale ne fera qu’accélérer.
La violence peut aussi être morale. À cet égard, nous devons balayer devant notre porte. Barreau et magistrature ont été durement interpellés, cette semaine, d’abord par l’hebdomadaire Marianne, ensuite par l’émission télévisée « Devoir d’enquête », à propos des pratiques inadmissibles d’un (ou deux ? au moment où j’écris ces lignes, je ne suis pas en possession des éléments permettant de répondre à cette question. Et c’est bien normal puisque je n’ai pas à être tenu informé des instructions qui sont confiées aux bâtonniers) avocat qui avait été investi de la noble mission d’administrer les biens de personnes âgées qui n’étaient plus en état de le faire eux-mêmes. Celui-là, ou ceux-là, a trahi la confiance que des magistrats avaient, manifestement trop aveuglément, placée en lui. Il s’agit de comportements gravement délictueux et il faut se féliciter qu’ils aient été sévèrement sanctionnés, d’ailleurs d’abord à l’initiative du barreau.
L’opprobre qui couvre ceux ou celles qui abusent de la confiance placée en eux ne peut cependant rejaillir sur l’ensemble des administrateurs provisoires qui exercent les missions qui leur sont confiées avec un grand professionnalisme et, d’ailleurs, souvent avec beaucoup de générosité. Mais nous devons aussi tirer les leçons de ces drames humains. Les bornes ont été excédées. Par lacune du contrôle. Sans sombrer dans la chasse aux sorcières et sans multiplier indument des exigences tatillonnes qui confineraient au harcèlement, nous devons mettre en place des instruments de contrôle plus performants, tant à l’égard des administrateurs provisoires qui manqueraient à leurs missions qu’à celle des magistrats qui failliraient à leur devoir de surveillance.
La question de la surveillance exercée par les barreaux sur les comptes de tiers sera à nouveau à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale d’AVOCATS.BE. Ce sera l’occasion de nous pencher à nouveau sur ces questions.
Des abus ont été dénoncés. Adoptons les mesures adéquates pour éviter qu’ils se reproduisent.
C’est l’honneur de notre profession. Au travail.