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Les avocats, par Piero Calamandrei
Les avocats, par Piero Calamandrei, Editions de la revue Conférence, 2017, 38 p., 19 €.
« Mais les avocats de Chiapelli sont plus proches de la vie quotidienne et visible : ce sont les avocats de notre société en liquidation, les avocats d’une bourgeoisie qui se défait. Regardez avec quelle négligence ils portent la toge ; il n’y en a pas un qui la tienne fermée, scellée par le rabat comme le voudrait le style ; ils n’ont pas connu l’époque où le président aurait chassé de la salle le défenseur malappris qui eût laissé voir par l’entrebâillement de la toge une veste de couleur claire, ou l’eût interrompu, si dans le feu de sa harangue la toge s’était ouverte, pour lui dire sévèrement : « Monsieur, arrangez-vous un peu. » Et voici au contraire ici, animés et bavards, les avocats mal fagotés de notre temps : débraillés et négligés, avec des vestes écossaises et des gilets fantaisie débordant sans pudeur de leur défroque noire abandonnée sur les épaules et prête à glisser. Ce ne sont pas les avocats cruels définitivement stylisés par Daumier ; ce sont des gens sans façons, plus commun mais plus proches de nous … ».
Piero Calamandrei fut avocat, professeur d’université, écrivain, politique. Né en 1889, à la fin du XIXe siècle, il est mort en 1956, alors que l’Europe naissait à peine. Les éditions de la revue Conférence ont la bonne idée de rééditer ce très beau texte qu’il écrivit pour présenter une collection de gravures que l’aquarelliste Francesco Chiapelli consacra aux avocats. Longtemps après Hogarth, Daumier, Forain, Gavarny ou Rouault, Chiapelli s’attaqua à son tour à ce sujet qui semble fasciner plus d’un artiste.