Ping-pong, Éric Therer vs Benjamin Monti, Liège, Eastern Belgium at night éd., 2015, 40 p., 8 €[1].

"Attendu que, tout en admettant la matérialité des faits, l'arrêt attaqué, sans avoir égard aux circonstances particulières dans lesquelles ils s'étaient manifestés, a relaxé les prévenus, au motif que les parties sexuelles de la jeune femme étaient cachées par un slip en monokini suffisamment opaque et que Claudine X n'avait pris aucune attitude ni affecté aucun geste lascif ou obscène ;

Mais attendu qu'en refusant de faire application de l'article 330 aux faits poursuivis qui s'analysent en une exhibition provocante de nature à offenser la pudeur publique et à blesser le sentiment moral de ceux qui ont pu en être les témoins, la cour d'appel a violé les textes ci-dessus visés;

Par ces motifs, casse et annule, mais seulement dans l'intérêt de la loi, et sans renvoi, l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 29 janvier 1965".

Fausse application de la loi ? L'appréciation de la cour d'Aix-en-Provence ne gisait-elle pas en fait ? N'est-ce point la Cour de cassation, transportée par ses émotions, qui aurait outrepassé ses prérogatives ?

Ce n'est manifestement pas ce qui intéresse Éric Thérer et Benjamin Monti.

Au moment où, particulièrement en France, les perd-la-pudeur reprennent vigueur, n'est-il pas délicieux de revoir comment, il y a cinquante ans, l'échange de quelques balles sur la Croisette, à l'intervention d'une jeune femme qui dévoilait des courbes dont l'histoire ne dit pas si elles étaient généreuses, a pu susciter une telle partie de ping-pong judiciaire ? Échange de conclusions au malheur des trois sets.

Et, à la fin, aurait dit Gary Lineker, c'est toujours la morale qui gagne.

Éric Thérer sert d'un art tendu. Benjamin Monti retourne un des seins. Prude heure de tante Yvonne. Mal lisse de l'illustration. Justice ordinaire ou ordurière ? Miroir aux amulettes ...

Avec ce joli petit opuscule impoliment illustré, que l'on feuillette et refeuillette, Éric Thérer poursuit son décryptage onirique du langage judiciaire. Voyage au pays des maux.

Casse et annule, sans renvoi, donc. Paulette, vos papiers !