Ainsi, la Belgique est devenue ce mardi soir, aux yeux de la FIFA, la première équipe de football du monde.

Passons sur le fait que, comme le souligne la presse spécialisée dans le foot, pour arriver à ce statut envié, notre équipe nationale n’a battu ni le Brésil, ni l’Argentine, ni l’Allemagne, ni l’Italie, ni l’Espagne, ni … Constatons simplement que, dans le même temps, elle ne doit son statut de sixième tête de série du prochain championnat d’Europe qu’à l’étonnante déroute des Pays-Bas, pourtant classés avant eux dans leranking européen.

C’est que ces deux classements sont indépendants l’un de l’autre (soit dit en passant, manifestement plus que ne le sont les présidents des deux vénérables institutions qui gouvernent le football européen et mondial…).

In-dé-pen-dant. Quel beau mot pour une réalité si prosaïque ! Peut-être est-il, dans ce cas, galvaudé.

Mais, quelques jours plus tôt, un barreau a reçu, pour la première fois, le plus beau des awards. L’Ordre national des avocats de Tunisie (déjà lauréat, en 2011, du prix des droits de l’homme du C.C.B.E., d’ailleurs sur proposition de la délégation belge) s’est vu décerner, en même temps que ses trois partenaires au sein du Dialogue national tunisien (l’Union générale des travailleurs tunisiens, la Ligue tunisienne des droits de l’homme et l’UTICA, l’organisation représentative du patronat tunisien), le prix Nobel de la Paix. Une belle récompense pour ce barreau courageux qui lutte pour son indépendance et celle de son peuple.

Indépendance. Le barreau turc aussi lutte pour la sienne. Il vient d’être meurtri. Un avocat, Maître Uygar Coşgun, compte parmi les 95 victimes de l’odieux attentat qui a frappé le peuple turc ce samedi 10 octobre 2015. À son président, Maître Metin Feyzioğlu, au bâtonnier d’Istamboul Umit Kocaşakal (également prix des droits de l’homme du C.C.B.E., cette fois en 2013, et aussi sur proposition de la délégation belge) et à tous leurs membres, AVOCATS.BE adresse ses plus sincères condoléances et son plus profond soutien. Savaşalim !

Indépendance. Comme beaucoup de ses confrères, Maître Mahienour El-Massry, jeune avocate égyptienne de moins de 30 ans en paie aujourd’hui le prix. Détenue depuis plus de quatre mois, elle vient de se voir condamnée à quinze mois de prison ferme pour avoir participé à un sit-inde protestation contre le gouvernement de son pays.

Indépendance. Combien d’autres avocats paient aujourd’hui de leur liberté leur combat pour l’indépendance de notre profession ? Parmi eux, Intigam Aliyev, un avocat azéri, et Wang-Yu et d’autres avocats du cabinet Fengrui à Pékin. Leurs combats viennent d’être salués par le Conseil des barreaux européens (C.C.B.E.), qui leur a décerné conjointement son prix des droits de l’homme 2015. Il leur sera officiellement remis le 28 novembre 2015 lors de l’assemblée générale qui aura lieu à Mons.

Indépendance. Ne galvaudons donc pas la nôtre.

Pourquoi un avocat reçoit-il cet extraordinaire privilège qu’est celui de pouvoir parler au nom d’un autre quand les intérêts les plus essentiels de ce dernier sont menacés ? Parce qu’il est indépendant : de l’État, de son barreau (mais avec le soutien de celui-ci, qui ne peut le lui accorder qui si lui-même est indépendant), de son adversaire et… de lui-même.

Oui, l’indépendance est plus que la plus belle de nos vertus. Elle est, avant tout, un devoir.

Cultivons-la. Défendons-là. Ici et partout. Aujourd’hui et demain comme hier.

Au nom d’Antigone, de Diego, libre dans sa tête et donc indépendant, et de tous ceux qui combattent pour la liberté.

Luttons.