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La juge de trente ans, Céline Roux
La juge de trente ans, par Céline Roux, Paris, Seuil, collection Raconter la vie, 2014, 80 p., 5,90€.
« Mes jambes flanchent, mes mains tremblent, mes joues me brûlent. Tenir droite, avancer, faire confiance à mon corps et me laisser guider … ». Première audience d’une juge de trente ans.
Comment peut-on juger quand on trente ans ? Quand on pas encore vécu ? Quand on doit encore découvrir la misère humaine, les infidélités, les trahisons, la méchanceté gratuite, la cruauté, bref tout ce qui fait l’humanité ? Pour être juge, la vie il faut l’avoir vu grouiller. Dans tous les coins.
« Vous êtes juges des enfants et vous n’avez pas d’enfant. Comment pouvez-vous savoir ? … Ce genre de discours ne la déstabilise pas. On ne demande pas à un juge d’application des peines d’avoir été condamné… ». Ouais. Peut-être, quand même, que les deux situations sont différentes. Ou qu’il faudrait que les juges d’application des peines sachent ce qu’est la prison …
C’est clair, j’étais prévenu en ouvrant ce livre.
Mais quel texte lumineux !
Juge solitaire, juge solidaire, juge au féminin, juge écrasée, juge égarée, juge engagée. Une vraie profession de foi.
Juge décidée, aussi. Il faut de l’aplomb pour ainsi oser trancher. Malgré les doutes. Souvent sans collégialité. Mais parce que c’est un devoir. Un rôle social. À assumer. Au risque de la douleur. En essayant d’en causer le moins possible. En la prenant parfois pour soi : « Si tu trouves que la décision que je vais prendre est injuste, si tu entends tes parents le dire, n’oublie pas que c’est moi, le juge, qui l’ai prise. Ni toi, ni eux n’en sont responsables. Ne leur en veux pas et sois en paix… ».
Voilà un petit ouvrage qu’il faudrait offrir à ceux qui croient que l’on peut se passer de l’état de droit.
Voilà un petit ouvrage qu’il faudrait offrir à ceux qui croient qu’un monde sans juge et sans avocat serait un monde meilleur…