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Prenons notre destin en mains
On ne peut certes pas affirmer que cette présidence commence sous les meilleures auspices !
Ce 1er septembre, selon toute vraisemblance (au moment où les présentes lignes sont écrites, nous espérons encore un improbable sursaut du gouvernement), les B.A.J. entreront en grève. Leur combat est juste. Il est inadmissible que le gouvernement, qui a pris des décisions politiques entrainant un considérable accroissement de la demande d’aide juridique (majoration des plafonds, automaticité du bénéfice accordé aux surendettés admis en règlement collectif de dettes, opérations de régularisation massive des étrangers en situation illégale, accélération des procédures d’expulsion, … - voyez la Tribune flash du 13 août dernier), délaisse la charge de ce service aux avocats.
Le 1er janvier 2014, nous serons assujettis à la T.V.A. C’était devenu inéluctable mais cela fera mal à beaucoup de justiciables (précisément ceux pour qui l’accès à la justice est le plus onéreux parce qu’ils se trouvent juste au-dessus des plafonds donnant droit à l’aide juridique) et à beaucoup d’avocats, parmi les plus fragilisés. AVOCATS.BE négocie avec le gouvernement les modalités d’exécution de cette importante décision, de façon à ce qu’elles soient le moins douloureuses possible. Des formations et un guide seront à votre disposition dans les prochaines semaines pour vous aider à passer ce cap aussi sereinement que possible. Il n’empêche que nous aurons des obligations comptables supplémentaires et que nos services seront plus chers pour nombre de nos clients.
Le 9 juillet 2013, la Cour constitutionnelle a annulé les dispositions qui laissaient les professions libérales en dehors du champ d’application de la loi sur les pratiques du marché, au moment même où nous sommes sur le point d’obtenir que le futur code de droit économique comprenne un livre VIbis comprenant des règles adaptées à l’exercice de nos professions.
Sans parler des incessantes attaques contre le secret professionnel (déclarations de soupçon, perquisitions, écoutes – allo Barack, tu m’entends ? - ; nous sommes particulièrement attentifs à cet aspect dans le cadre de l’entrée en vigueur de notre assujettissement à la T.V.A.), l’indépendance et l’autorégulation de notre profession (bien mises à mal aujourd’hui dans ce que l’on a pris l’habitude d’appeler les pays de la Troïka), ses structures fondamentales (demain les A.B.S. ? et les consultations d’avocats dans les supermarchés ?) ou d’une réforme du paysage judiciaire mal préparée… J’arrête là.
Sursum corda ! Nous ne pouvons pas nous laisser faire.
Mais, pour ce, il faut sans doute que nous nous y prenions autrement.
Nos structures, trop éclatées, ne sont pas assez efficaces. Nous devons renforcer nos organisations faitières : le Conseil des barreaux européens (C.C.B.E.) et AVOCATS.BE. Elles doivent se voir allouer plus de moyens. Leurs modes de fonctionnement doivent être allégés. Je proposerai à l’assemblée générale de revoir le règlement d’ordre intérieur d’AVOCATS.BE. D’autre part, la réforme du paysage judiciaire ne s’accompagnera sans doute pas, immédiatement en tout cas, d’une réduction sensible du nombre des Ordres mais il faut, à tout le moins, que les Conseils des différentes entités collaborent beaucoup plus.
Nous ne sommes pas assez prospectifs. Nous attendons les coups et nous essayons de les parer. Nous devons nous charger de notre avenir. J’ai proposé à AVOCATS.BE et à l’O.V.B. de confier à un groupe d’experts le soin de rédiger un rapport sur l’avenir de notre profession. Définir des perspectives pour tous, hommes et femmes, jeunes et vieux, de la grande association internationale au cabinet individuel, en passant par toutes les formes de groupements. Avocat en entreprise, avocat employé, fragmentation de la profession, multidisciplinarité, prises de participation extérieures dans le capital, aide juridique et pro bono, développement et défiscalisation de l’assurance protection juridique, extension de notre périmètre d’action, … Définir un programme politique, une ligne d’action. Puis proposer et entreprendre. Reprendre la main.
Plusieurs chantiers d’importance ont déjà été lancés par mes prédécesseurs. AVOCATS.BE est maintenant doté d’une équipe solide. Si, en nombre, elle est moins étoffée que celle dont disposent d’autres organisations comparables, elle ne leur rend rien en qualité, tout au contraire.
Nous disposons d’une représentation efficace auprès des institutions européennes, du parlement et du gouvernement belge, d’un service informatique qui met en place le réseau et la plate-forme dont nous avons cruellement besoin, d’un service social, d’un agent de communication et d’un secrétariat performant.
Sur tous ces fronts, il faudra enfoncer le clou, aller plus loin. Ce plan informatique doit devenir une réalité concrète avant la fin de mon mandat.
Nous sommes présents aux échelons européen et national. Nous devons l’être aussi dans les régions.
Et notre voix doit être plus et mieux entendue. Je mettrai, plus encore, l’accent sur la communication.
Il faut que tous les acteurs de la vie socio-économique et politique belge comprennent qu’en défendant l’avenir de notre profession, c’est aussi les valeurs fondamentales de notre société que nous défendons : la liberté, la loyauté, l’indépendance, le respect de la vie privée, la solidarité, la dignité.
L’avocat est multiple. Conseil, conciliateur, médiateur, défenseur. Spécialiste ou généraliste. Solitaire ou intégré. Loup ou agneau, selon les circonstances. Mais toujours il est là, à côté d’un homme pour l’aider à se tenir debout.
Robert, Luc, Pierre, Jean-Marie et François m’ont ouvert la voie. Être digne de ceux qui nous ont précédés. C’était la devise de mon grand-père. Je la fais mienne.
Publié dans le forum du 1er septembre 2013