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20 mars 2015 : Il faut sauver le pouvoir judiciaire ! - Mot du président - 12/03/2015
Le 20 mars 2015 comptera dans l’histoire de la justice belge.
Pour la première fois, l’ensemble des avocats, magistrats, greffiers et membres des personnels des greffes et des parquets, experts judiciaires se réuniront ensemble pour dénoncer le manque de moyens accordés par le gouvernement à la justice.
L’ampleur de ce rassemblement est à la mesure de la situation du pouvoir judiciaire.
Le Gouvernement entend lui imposer, en quatre exercices budgétaires, une diminution de son budget de 10% (4% en 2015, puis 2% de plus en 2016, 2% de plus en 2017 et 2% de plus en 2018) !
Ceci alors que, de façon endémique, le SPF Justice est dans l’incapacité de payer ses fournisseurs. Son déficit (cumulé) au 31 décembre 2014 était de l’ordre de 100 millions d’euros.
Ceci alors que les bâtiments de justice (on ne parlera plus de Palais,ou alors au sens archéologique du terme…) sont, pour la plupart, dans un état de délabrement abominable.
Ceci alors que l’aide juridique est, depuis plus d’une législature, dans le marasme, le Gouvernement n’assurant même plus le maintien de la valeur du point, alors pourtant que les prestations à défrayer n’augmentent pas (et, même, diminuent).
Ceci alors que les services des greffes continuent à travailler, en dépit de tout bon sens, sans informatique ou avec une informatique préhistorique (les frais postaux qu’assume le SPF Justice s’élèvent à 28 millions d’euros ! Sans parler des frais que les autres SPF exposent pour adresser des plis à la Justice !).
Certes, il reste des marges de progression. Avec un peu d’imagination et de bonne volonté, il est possible, çà et là, de faire preuve de créativité. De faire plus, ou mieux, avec moins.
Mais il y a des limites infranchissables.
La Justice, ce n’est pas qu’un SPF. C’est, avant tout, l’un des trois pouvoirs constitutionnels sur lequel se fonde notre État démocratique.
La Justice doit avoir les moyens de fonctionner. Avec des cadres adéquats, dans des bâtiments adaptés et entretenus, avec du matériel – informatique, surtout – performant. Avec des greffes ouverts, puisqu’ils ne peuvent même pas être atteints par des communications électroniques.
L’accès à la justice pour tous, les plus démunis qui bénéficient de la maigre aide juridique qui leur est jusqu’ici concédée, mais aussi ceux qui ne sont que de peu au-dessus de son plafond, est un droit constitutionnel qui doit être assuré par l’État.
Nous devons accepter les critiques justifiées, oui. Améliorer certaines pratiques, voire nous défaire de réflexes contreproductifs, oui. Nous ouvrir à des solutions novatrices. Traquer la chicane. Même avec quelques rides. Oui.
Mais nous ne pouvons accepter des mesures d’économie qui frappent tout de façon indistincte, ceux qui travaillent vite et bien comme ceux qui doivent être encouragés, voire tancés. Nous ne pouvons accepter des réformes irréfléchies, qui induisent des coûts supplémentaires imprévus (ou, pire, des restrictions à l’accès à la justice injustifiées) sans générer de véritables diminutions de dépenses. Des mesures qui mettent en cause le fonctionnement même de l’institution. Non.
10% de moins, à un tel rythme qui plus est, c’est intenable, inacceptable. Non.
Non, trois fois non, parce qu’une justice qui fonctionne est la seule garante de nos valeurs fondamentales : liberté, égalité, solidarité, dignité, sécurité, …
Et tant pis si la circulaire du Ministre du budget ne peut, dès lors pas être respectée. Et tant pis si l’Inspection des finances le fait remarquer. Sauf erreur, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et notre Constitution ont une valeur supérieure.
C’est pourquoi nous vous invitons à être présents en masse, le vendredi 20 mars à 13.00, au Palais de Justice de Bruxelles (salle des audiences solennelles de la Cour d’appel) pour une manifestation commune de tous les acteurs de l’Ordre judiciaire (plus d'infos ici).
Plus que jamais, luttons.