Suivez mes commentaires sur l'actualité de la justice et des barreaux
Mot du président
Les élections ont rendu leur verdict.
Les présidents de parti sont maintenant en lice. Ils s’efforcent à la fois d’imposer leurs vues à leurs homologues et de maitriser les élus de leur camp.
Nous ne manquerons évidemment pas, dans ce concert, d’ajouter notre voix afin que les promesses qui nous ont été faites pendant la campagne électorale, notamment en matière d’accès à la justice, soient respectées et mises en œuvre.
Mais dans l’actualité récente, trois autres évènements ont retenu mon attention.
Le premier est resté assez inaperçu mais il est, pour les barreaux, particulièrement important.
Le 28 mai 2014, réunis en une triple assemblée générale, dans trois salles distinctes du palais des foires de Libramont, les trois barreaux de la province du Luxembourg ont décidé de fusionner.
Au 1er septembre 2014, les barreaux de Neufchâteau, Arlon et Marche-en-Famenne ne feront plus qu’un, à l’échelle du nouvel arrondissement judiciaire qui vient d’être mis en place par le législateur.
Un arrondissement judiciaire, un président de tribunal, un procureur du Roi, un barreau, un bâtonnier, un conseil de l’Ordre.
Je veux saluer le courage politique de cette triple décision. Certes, la tentation de rester entre soi, replié sur ses habitudes, peut être forte. Mais l’ouverture permet la professionnalisation, une importante majoration des services rendus et, j’ose l’affirmer, la capacité de résister aux défis du futur et du présent.
Je le répète : notre profession ne pourra survivre que si elle accepte d’élever ses standards de compétences, de professionnalisation et de transparence à la mesure des exigences des consommateurs d’aujourd’hui et des autorités qui veillent à la régulation du marché.
L’union doit faire la force. J’espère donc que cette fusion, la première, sera rapidement suivie d’autres.
Bravo aux luxembourgeois qui, une nouvelle fois, ont une ardeur d’avance !
L’actualité récente a également été marquée par l’horrible massacre qui a été perpétré au Musée juif de Bruxelles.
Vous aurez pris connaissance, je l’imagine, du communiqué qu’AVOCATS.BE a diffusé à cette occasion. Il est reproduit dans cette Tribune.
Mais peut-être aussi avez-vous été frappé par la diffusion sur les ondes de l’interview d’une avocate française qui avait, dans une précédente affaire, assumé la défense du principal suspect de ce crime odieux. Il y avait dans ses propos des généralités sur l’influence perverse que le milieu carcéral peut exercer sur ceux qui y sont soumis. Je ne puis que les approuver.
Mais, bien au-delà, elle a aussi émis diverses considérations quant à la personnalité de celui qui avait été, précédemment, son client.
Disons-le tout net : cela me parait inadmissible. Le secret professionnel, auquel nous sommes astreints pour assurer la protection de ceux qui nous font confiance, nous interdit de révéler des éléments qui ne sont ainsi parvenus à notre connaissance que parce que nous avons accepté une mission d’avocat. Nous ne pouvons admettre qu’un avocat, ou d’ailleurs un médecin (voyez la tristement célèbre affaire Gubler, du nom de ce médecin qui avait soigné François Mitterrand et qui, après son décès, a publié un ouvrage en y révélant tous les secrets qu’il avait appris à cette occasion), révèle ainsi des éléments qui n’ont pu parvenir à sa connaissance qu’en sa qualité d’avocat, investi d’une mission de défense.
Et, d’ailleurs, de quel mandat pouvait encore se prévaloir cette avocate qui n’intervenait plus pour la défense de ce client depuis de nombreux mois, voire de nombreuses années ?
Puisse la médiatisation de ce dérapage nous rendre plus attentifs à la préservation de cette valeur essentielle de notre profession qu’est le secret professionnel.
Pour le reste, vous trouverez dans ces colonnes l’ensemble de vos rubriques habituelles. Elles valent toutes la peine d’être lues, évidemment.
Mais je voudrais particulièrement mettre en exergue un de ces articles. Vous connaissez tous l’importance de la jurisprudence issue de l’arrêt Salduz de la Cour européenne des droits de l’homme.
Vous savez aussi que, dans sa foulée, l’Union européenne a mis en chantier un vaste projet d’amélioration des droits des personnes privées de liberté. Dans ce concert, une question prégnante est celle de l’accès au dossier pour l’avocat qui doit conseiller la personne mise en garde à vue. Confrontée à cette difficulté récurrente, la commission de droit pénal, présidée par mon prédécesseur Robert De Baerdemaeker, a décidé d’élaborer un modèle de conclusions qui peuvent être déposées chaque fois qu’un avocat est confronté à un refus d’accès à des pièces qui sont indispensables pour lui permettre d’assumer correctement sa mission.
Je remercie tout particulièrement Marc Nève et Sandra Berbuto qui ont pris une part prépondérante dans l’élaboration de ce projet.