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Mot du président - 05/12/2013

Chers confrères,

D’ici la publication de la prochaine Tribune, nous connaîtrons probablement l’arrêt qu’aura prononcé la Cour constitutionnelle sur le recours en suspension que nous avons introduit contre la loi du 30 juillet 2013 supprimant l’exonération de la T.V.A. sur les prestations d’avocats. Et nous serons fixés, au moins temporairement, sur notre sort.
 
Comme vous le savez, AVOCATS.BE ne s’est pas contenté d’introduire ce recours. Tout a été mis en œuvre pour que, si le nouveau régime entre en vigueur, vous soyez prêts à l’affronter.
 
Notre cycle de formation vient de se terminer. Il a rencontré un très vif succès. Je ne puis, par ailleurs, que vous rappeler l’existence de notre site dédié à l’entrée en vigueur de la T.V.A. Vous y trouverez donc neuf FAQ qui contiennent réponses aux principales questions que vous vous posez. Ces FAQ sont régulièrement mises à jour, pour tenir compte des évolutions dont nous avons connaissance et pour coller aux questions concrètes que vous nous posez.
 
Très bientôt, viendra s’y ajouter un petit manuel comprenant l’essentiel de ce que nous devons savoir pour affronter le nouveau régime. Visitez donc ce site régulièrement.
 
En marge de ces préoccupations, l’actualité judiciaire nous donne deux raisons de nous réjouir.
 
Ce 15 novembre 2013, la Cour de cassation de Belgique, dans une affaire particulièrement médiatisée, vient de décider que les permissions de sortie et les congés pénitentiaires constituent un droit subjectif ressortissant aux juridictions judiciaires. Ceci signifie donc que lorsque toutes les conditions prévues par la loi sont réunies (soit (1) le condamné doit se trouver dans l’année précédant la date d’admissibilité à la libération conditionnelle ; (2) il n’existe pas de contre-indications auxquelles la fixation de conditions particulières ne puisse répondre, ces contre-indications portant sur les risques que le condamné se soustraie à l’exécution de sa peine, ou qu’il commette des infractions graves pendant le congé pénitentiaire, ou qu’il importune les victimes ; (3) le condamné marque son accord sur les conditions qui lui sont imposées), le ministre de la justice est tenu d’accorder la permission de sortie ou le congé pénitentiaire qu’un condamné sollicite. En cas de refus qui ne repose pas sur l’une de ces conditions, les juridictions judiciaires sont donc compétentes pour le censurer.
 
Dans un registre différent, vous n’aurez manqué d’avoir votre attention attirée par la décision prise par la cour d’appel de Bruxelles, ce 27 novembre 2013, à l’occasion d’un litige dans lequel des étudiants, membres du comité d’action et de soutien aux sans-papiers, sont mis en prévention. Ce litige avait fait l’objet de mesures de sécurité particulière et, d’initiative, la police de la zone de Bruxelles-capitale – Ixelles avait estimé devoir, entre autres mesures d’ordre, relever l’identité de toutes les personnes qui souhaitaient pénétrer dans la salle et, curieuse pratique de fouilles, confisquer leurs téléphones mobiles. Cette situation a été dénoncée au procureur général, qui s’en est indigné, a qualifié d’inadmissible la saisie des effets personnels du public et s’est désolidarisé de ces mesures.
 
Le président de la chambre, qui n’était pas au courant non plus que des mesures de sécurité particulièrement sévères avaient été ordonnées, a choisi de reporter l’audience, en estimant qu’il y avait eu atteinte au principe de la publicité des débats.
 
La publicité des débats, qui est une des garanties démocratiques les plus importantes figurant dans notre Constitution a donc ainsi été, spectaculairement, respectée. Voici deux remarquables exemples de l’importance de l’indépendance des magistrats. Et donc de celle des barreaux.
 
Cette indépendance n’est pas assurée partout, malheureusement. Ce 29 novembre 2013, la remise solennelle du prix des droits de l’homme du C.C.B.E., sur proposition du barreau belge, à Maître Kocasakal, bâtonnier du barreau d’Istanbul, et aux membres de son conseil de l’Ordre, qui ont refusé de désigner de nouveaux défenseurs aux avocats emprisonnés pour avoir assuré la défense des membres du parti kurde DHKP-C, après que leurs premiers défenseurs avaient été démis pour avoir dénoncé de multiples atteintes à leurs droits de défense, vient nous le rappeler avec force.
 
Rappelons-nous la phrase de Calamandréi : « Les professions de magistrat et d’avocat obéissent à la loi des vases communicants. Dévaloriser une c’est automatiquement dévaloriser l’autre ».