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Le procès du dragon, par Emmanuel Pierrat

Le procès du dragon, par Emmanuel Pierrat, Paris, Le Passage, 2015, 144 p., 16€.

 

Sous l’ancien régime, on ne faisait pas seulement des procès aux sorcières[1] et aux hérétiques.

On n’hésitait pas non plus à traduire en justice des animaux.

Soit il était possible d’appréhender l’auteur du crime, un taureau qui avait tué un fermier, un porc ou un chien qui avait surpris un enfant dans son sommeil, et il était cité devant la justice séculière[2].

Soit l’animal criminel était insaisissable – des fourmis, des sauterelles, des termites, des chenilles, des limaces, voire des tourterelles - et leur sort était alors confié à la justice ecclésiastique, chargée de les excommunier, de les exclure du grand-œuvre divin[3].

Cela Emmanuel Tapiro, grand amoureux de la faune, le sait. Mais lorsque, fouillant dans les archives de son grand-père, fondateur du cabinet d’avocat dont il est l’héritier, il tombe sur une pile de cartonnages desséchés, noués par une mince cordelette et sur laquelle sont calligraphiés les mots « Le procès du dragon », il est intrigué. Un dragon devant les tribunaux ? Il n’est pas nécessaire d’être un des hobbits ou une moule pour s’en étonner…

C’est le début d’un curieux voyage initiatique qui le mènera de Djakarta à Bali, puis de Lombok à Komodo.

Qu’avait été faire son grand-père, quelques quatre-vingt ans plus tôt, en Indonésie batave, à l’appel de son ami Wayan, à la poursuite de ce mystérieux dragon ?

Notre confrère Emmanuel Pierrat, alias Emmanuel Tapiro, s’engage progressivement dans les tréfonds de l’âme indonésienne.

Choc des cultures, choc des civilisations. Voyage au travers de l’humanité.

« Il y a des pays où la sueur n’a pas de prix ».



[1] Voyez Indulgences, de Jean-Pierre Bours, dont la recension a été publiée sur ce blog

[2] Pour un exemple d’une de ces sentences, voyez Savigny, 10 janvier 1457, J.L.M.B., 2013, p. 161.

[3] On trouve encore trace de procès intentés, au début du XVIIIe siècle, contre des tourterelles qui ravageaient les cultures canadiennes ou contre des fourmis dont le travail de sape menaçait les fondations d’un monastère brésilien, dans le Maranhao (E. AGNEL, Curiosités judiciaires et historiques du Moyen-Âge : Procès contre les animaux, Paris, J.B. Dumoulin, 1858).