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5 meurtres, comme une œuvre pieuse

5 meurtres, comme une œuvre pieuse, par René Swennen, Paris, L'Harmattan, 2016, 116 p., 12,5 €.

"Ce qu'est la tyrannie ? C'est l'État de droit, avvocato...

Donc, je me suis liée avec cet homme d'affaires qui prônait le rétablissement de l'État de droit en Sicile, c'est-à-dire le droit pour un patron, lui en l'occurrence, de licencier en toute légalité trois cent personnes dans une entreprise bénéficiaire afin de délocaliser l'usine en Pologne et d'augmenter encore les bénéfices.

Ce n'est pas sympathique, je sais, mais c'est cela l'État de droit..."

René Swennen vient de fêter son jubilé professionnel. Cinquante années consacrées à la défense, avec quelques brillantes incursions en littérature, qui lui valurent de belles distinctions, dont un prix Rossel.

Il se souvient de cette cliente qui lui avait confié sa vérité avant de mentir aux enquêteurs. Cette cliente qu'il n'a pas eu à défendre, car les enquêteurs n'ont pu la confondre. Un meurtre pieux, à l'italienne, comme dans le Délit d'amour de Comencini. Pour les mêmes raisons. Enfin, pas tout à fait. Ici, il y a aussi la Costa Nostra.

Cette confession est le point de départ de ces quatre nouvelles. Quatre nouvelles, cinq meurtres par idéal. Au nom d'une œuvre politique, d'une foi, d'un critère supérieur d'organisation. Lorsque l'État de droit ne suffit pas, ne satisfait pas.

Vous n'êtes pas d'accord ? Mais "je ne juge pas, ni n'approuve, ni ne condamne. Je raconte ".

J'adore "Feuilles d'automne", un récit naturaliste, un peu à la Soleil des Scorta, avec du souffle, du souffre et du stupre. Une Italie parallèle ou, plutôt, profonde, entre religion et mafias. "Vendetta" en est, en quelque sorte, l'épilogue. Tout est bien qui finit mal. Ou l'inverse.

"Le vieux jacobin" nous emmène dans ce Paris du début du XIXe que René Swennen aime tant. Un Paris sale et instable mais savoureux. Un Paris de prostituées et d'idéalistes, de révolutionnaires, de comploteurs et d'assassins. Un Paris où le droit est un moyen au service de fins qui ne sont pas toujours légalistes. Avec une chute bien tapée.

Puis il y a "Le clan des chauves-souris". Une femme, ancienne prostituée (encore ?) devenue journaliste d'investigation, et ses trois amants : un policier, un avocat, un romancier. Je manipule, tu manipules, il manipule. Que le meilleur gagne.

Et, entre Paris et Bruxelles, cette phrase qui sonne comme une profession de foi : "Liborio, je tiens à te dire une chose. Tu fais un métier de putain. L'avocat pour moi est un homme qui porte la robe, qui rend visite aux prisonniers, qui plaide et qui les fait libérer. Tu as choisi l'argent contre la dignité. Ne compte pas sur moi pour te suivre".

Le sage a dit.