Tatyana Eatwell et Caoilfhionn Gallagher, avocates en danger
Posté le 20/02/2025Tatyana Eatwell et Caoilfhionn Gallagher sont deux avocates britanniques.
Tatyana Eatwell et Caoilfhionn Gallagher sont deux avocates britanniques.
Poste restante, par Frédéric Kurz, Liège, Murmure des soirs, 2024, 194 pages, 16 euros.
« Si j’avais le pouvoir de Staline, je ne le gaspillerais pas à réduire au silence les romanciers. Je réduirais au silence ceux qui écrivent sur les romanciers. J’interdirais toute discussion publique de la littérature dans les journaux, les magazines et les revues spécialisées. J’interdirais l’enseignement de la littérature dans les établissements scolaires, du primaire au supérieur en passant par le secondaire. Je prohiberais les groupes de lecture et les chats de discussion sur les livres sur Internet, et je mettrais sous surveillance les libraires pour vérifier qu’aucun vendeur ne parle de livres avec un client, et que les clients n’osent pas se parler entre eux. Je laisserais les lecteurs seuls avec les livres, pour qu’ils puissent en faire ce qu’ils veulent en toute liberté. Je ferais cela pendant autant de siècles qu’il faudrait pour désintoxiquer la société de votre charabia ».
Cher Frédéric Kurz,
Samat Matsakov est un avocat kirghiz.
Rimbaud/Verlaine, une affaire insolite, par François Swennen, Paris, Cohen & Cohen, 2024, 96 pages, 21 euros.
Les juges de Bruxelles ne se sont pas fatigués avec le dossier de Paul. Ils ont dit pour droit : « À Bruxelles, le dix juillet mil huit cent septante-trois, Paul Verlaine a volontairement porté des coups et blessures ayant entrainé une incapacité de travail personnel à Arthur Rimbaud ». C’est tout. Dans l’enchainement, ils lui ont infligés la peine la plus sévère édictée par leur code – deux ans d’emprisonnement – pour ce délit, sans aucune autre justification que celle, nauséabonde, qu’ils n’ont pas eu l’honnêteté, ou le courage, ou simplement l’envie, de dévoiler dans les attendus de leur jugement. Ils ont peut-être aussi, tout bêtement, buté sur le mot à choisir – immorales ou plutôt contre-nature – et trouvé moins périlleux, et surtout plus confortable, de se taire.
Ainsi s’exprime l’un des trois témoins que François Swennen a convoqués pour donner un nouvel éclairage sur cette étrange – insolite ? – affaire : le 10 juillet 1873 à Bruxelles, Paul Verlaine tire deux coups de feu sur son jeune amant, Arthur Rimbaud.
Toufik Belala est un avocat algérien.
Également professeur, Toufik Belala s’est investi dans la défense des détenus d’opinion et des droits de l’homme. Il est connu pour avoir défendu l’opposant politique Karim Tabbou lors des procès qui lui ont été intentés. À cette occasion, il a organisé plusieurs conférences de presse pour commenter les charges retenus contre son client.
Alice Nkom est une avocate camerounaise, née en 1945.
Cabane, par Abel Quentin, Paris, Les Éditions de l’Observatoire, 2024, 480 pages, 22 euros.
Au début des années ’70, le professeur Stoddart, qui enseigne la dynamique des systèmes à Berkeley et qui a veillé à ce que son université soit à la pointe des développements informatiques, demande à quatre étudiants de modéliser l’évolution de notre monde. Leur cahier des charges : « analyser les causes et les conséquences à long terme de la croissance sur la démographie et sur l’économie mondiale », en croisant les données relatives à la pollution, la production industrielle, la consommation, les ressources non renouvelables et la démographie mondiale.
Il y a d’abord Mildred, la plus âgée, assistante de Stoddart, qui prendra la tête de l’équipe. Il y a Eugene Dundee, fils d’un pasteur mormon, qui deviendra son époux. Il y a Quérillot (prononcez « kerioth », comme l’iscariote en hébreu), un jeune français arriviste. Et il y a Gudsonn, un mathématicien norvégien, un peu égaré dans cette équipe d’économistes, visionnaire mais quelque peu instable.
Il en sort neuf courbes. L’une d’elle n’est pas catastrophique. Mais elle est fondée sur un scénario irréaliste : que le monde prenne immédiatement conscience des dangers de la croissance et adopte illico des comportements plus responsables… Toutes les autres mènent à la catastrophe, à horizon seconde moitié du XXIe siècle. Un peu plus tôt, un peu plus tard…
Dmitry Talantov est un avocat russe, âgé de 63 ans.
Le droit saisi par l’art, sous la direction de Rémy Cabrillac, Paris, Dalloz, 2023, 296 pages, 35 euros.
« Je veux faire des dessins qui frappent ».
C’est ce que Vincent Van Gogh écrivit à son frère Théo. Est-ce le point de départ de l’entreprise de Rémy Cabrillac, qui s’est adressé à une bonne trentaine de juristes, surtout des professeurs d’université, pour leur demander choisir une œuvre d’art pour livrer aux lecteurs les émotions et réflexions qu’elle suscitait en eux ?
Ainsi défini, le projet se comprend mieux qu’à la seule lecture du titre de l’ouvrage. Car, à dire vrai, peu de contributions traitent vraiment d’hypothèses où l’artiste a saisi le droit. Il y a certes La ronde des prisonniers, de Van Gogh, que Rémy Cabrillac analyse lui-même, montrant comment l’artiste a mis en scène le monde carcéral, parvenant à saisir dans le regard du personnage central toute la misère de notre droit pénal : le sort le met dans une société si mal faite, qu’il finit par voler ; la société le met dans une prison si mal faite, qu’il finit par tuer. Qui est réellement coupable ? interrogeait Victor Hugo dans Claude Gueux...
Le droit saisi par l’art, sous la direction de Rémy Cabrillac | La Tribune